Universal Language

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Capitale de la province canadienne anglophone du Manitoba, Winnipeg était connue pour abriter l'un des cinéastes les plus originaux de la planète: Guy Maddin. Le voici qui s'est trouvé un disciple local. Matthew Rankin s'est fait la main sur des courts-métrages bizarres et un biopic politique délirant (The Twentieth Century) avant de débarquer à Cannes avec cet Universal Language qui imagine sa ville mystérieusement devenue... persane. Tout est parti de son amour pour le films des Iraniens Abbas Kiarostami et Jafar Panahi, dont il commence par imiter le style modeste avant de glisser vers une tonalité plus pince-sans-rire nordique façon Aki Kaurismäki ou Bent Hamer. Parlé en farsi (avec un peu de français), le film s'ouvre sur des vignettes apparemment décousues mettant en scène un maître d'école cynique, des fillettes de sa classe qui trouvent un billet pris dans la glace, un guide touristique qui tente de vanter les charmes peu évidents de la ville et un employé d'administration déprimé (joué par Rankin lui-même) qui revient de Montréal pour retrouver sa mère. Surprise: alors que le décalage initial semble condamné à vite plafonner, tout commence à se mettre en place pour finir par composer une œuvre sensible et sincère. S'y lit en filigrane la mélancolie de l'homme blanc prisonnier de son univers d'une froideur désespérante, qui retrouve des couleurs en s'ouvrant à une culture venue d'ailleurs et des gens d'une nature plus généreuse. Tout le contraire du repli identitaire à la mode, en somme, et dans une mise en scène joliment maîtrisée, qui nous rappelle que le cinéma peut aussi être un art poétique.