Le rendez-vous de l’été
Valentine Cadic, France, 2025o
Paris, durant les Jeux olympiques de 2024. Blandine, 30 ans, est venue de Normandie pour assister aux compétitions de natation et retrouver une demi- sœur perdue de vue depuis 10 ans. Habituée au calme et à la solitude, Blandine découvre une ville bouillonnante dont elle n’a pas les codes. Au fil des jours, la jeune femme fait des rencontres, se perd, hésite, tente de (re)tisser des liens et de naviguer au cœur d’une ville enfiévrée par cet événement hors normes.
Il aura fallu que Paris accueille les Jeux Olympiques pour que Valentine Cadic trouve la matière de son premier long-métrage et invente une véritable créature de cinéma. Un grand corps maladroit, une manière de parler hésitante, des regards fuyants: le diable de l’authenticité se cache dans ce genre de détails. Inconnue du grand public, Blandine Madec est d’une vérité cinglante, que la dizaine d’acteur·ices à l’affiche des trois quarts de la production française ne sont plus en mesure d’atteindre. Timide, réservée, taciturne, Blandine est si gentille avec tout le monde que cela en devient agaçant. Sa peur de déranger, son incapacité à s’imposer quand on lui marche sur les pieds, n’en sont pas moins bouleversantes. Montée à Paris pour assister à une compétition de natation et rendre visite à sa demi-sœur et à sa nièce, la trentenaire aurait dû voyager accompagnée. Le cours de sa vie sentimentale en a décidé autrement. Une célibataire en vacances? On pense bien sûr au Rayon vert de Rohmer. Et la référence aux Rendez-vous de Paris, succession de scènes de drague dans les beaux quartiers de la capitale, invite à croire que la séduction se cachera à tous les coins de rue. Mais si le film trouve son rythme dans l’enchaînement lâche de rencontres hasardeuses, les sous-entendus charnels n’ont pas droit de cité à l’écran. Tout sauf une séductrice (et en cela résolument anti-rohmerienne), Blandine cultive une solitude dont on ne saurait dire si elle est heureuse, mais dont la paisible détermination ne saurait laisser indifférent. «Tu es une drôle de fille», lâche affectueusement un électricien rencontré aux abords d’une piscine. Si les Jeux Olympiques auront entraîné l’expulsion de populations (sans-abris, mendiant·es, etc.) que leurs organisateur·ices ne voulaient pas voir dans les rues de la capitale, Le rendez-vous de l’été aura redirigé l’attention vers des personnages que le cinéma français ignore: anonymes, quelconques, discrets.
Clément Desbaillet
